Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Maman Rila
15 juin 2010

Une âme danse...

 

Si je n'écrivais plus depuis quelques temps, c'est qu'il n'y avait plus rien à écrire... Ou alors très peu. Un chat noir est apparu dans sa mythologie, "il s'appelle Martyse et un autre marron aussi qui peut faire des bébés, mais pas Martyse parce qu'elle est opérée..."

Un autre jour en revenant de la piscine:

"C'est maman Rila qui m'a appris à marcher comme ça (Anastasie esquisse un genre de pas de l'oie), elle disait que je faisais l'andouille..."

Des questions aussi reviennent souvent sur le "squelette" et ce qu'il y a à l'intérieur du corps, "la peau qu'on arrache" (en se pinçant la peau du cou...)

Les jours passent sans éclat, jusqu'au feu d'artifice de ce soir...

Ce matin nous avions toutes les deux rendez-vous chez l'ophtalmologiste, moi pour des problèmes anciens et récurrents dont je vous ferai grâce à moins d'y dédier un blog entier; elle parce que le médecin scolaire avait repéré une petite baisse d'acuité d'un côté. Dieu merci, il ne faudra pourtant pas encore poser de verre devant ses yeux d'azur et d'étoiles...

De son point de vue, elle aurait beaucoup aimé avoir des lunettes comme son frère Cosme, alors pour la consoler je lui ai acheté un ruban de gymnastique. Rien à voir effectivement.

Dans l'après midi, elle prenait le ruban et parlait de maman Rila à tout bout de champ.

Ce soir nous avons cherché des vidéos de gymnastes dansant avec un ruban, certaines l'ont émerveillée.

Elle a voulu que je lui apprenne à les imiter. Nous avons fait tourner le ruban autour de nous, tout droit, en faisant des ronds des vagues, des serpentins...

Et tout d'un coup elle s'est mise à danser... avec grâce, aisance, longuement dans la lumière du soir... Je voyais vraiment son âme à travers cette danse.

Elle répétait bizarrement "C'est maman Rila qui m'a appris à faire comme ça..."

En dansant sa langue s'est déliée:

"Avec maman Rila je dansais anaga pour les ancêtres ..."

En disant ça elle dansait vraiment, avec cette énergie, cette joie, cette spontanéité et je voyais la scène. Les robes colorées sur les peaux noires, les sourires.

A un moment, partageant sa joie j'ai dit "Merci maman Rila de m'avoir donné ta fille"

Alors elle s'est jetée dans mes bras en disant "C'est gentil de dire merci..."

"Anaga c'est une fête que pour les filles, pas pour les mamans"

"Anaga, c'est chez un monsieur, il nous donnait quelque chose pour danser"

"Anaga-vifé, il est gentil..." "Finla-anaga c'est pas le même, il veut tuer tout le monde mais il ne sait pas où est la cabane de maman Rila"

"Tu ne peux pas m'accompagner chez maman Rila"

"Elle me manque, maman Rila, elle est triste de moi"

"Maman Rila est morte et maintenant elle est au ciel"

"Elle me manque beaucoup"

"Maman Rila s'est transformé en monstre pour me tuer"

"C'est le papa qui a tué maman Rila"

Par moment elle prononçait des mots étranges et difficilement tran scriptibles.

"Maman Rila n'aimait pas être noire, elle voulait se laver mais ça marchait pas, alors elle a pris un pinceau et ça marchait" "Elle voulait être blanche"

"Elle disait -Je veux rester seule...!"

"Après quand j'étais morte des hommes m'ont prise et m'ont emportée ici et j'étais ton bébé"

Puis comme épuisée après ces émotions:

"Je ne t'aime pas, tu n'es pas ma maman"

Elle a eu plusieurs phrases de ce genre. Mais je comprenais le conflit en elle.

Il est difficile de transcrire de mémoire tout ce qu'elle m'a raconté ce soir. Elle me nommait des figures de danse dans une langue inconnue.

Nous avons enroulé le ruban sur lui même pour le ranger sans faire de noeuds.

Cosme disait "C'est incroyable...!"

 

Publicité
Commentaires
Publicité